Episode 66
Le Balablen.
Cet après midi, Dorine et moi nous nous sommes rendus à
l’ambassade. Sur le chemin tous le monde nous saluait et il est vrai qu’on ne
pouvait pas passer inaperçu et encore moins avec notre tout nouvel uniforme de
capitaine en second. De jeunes Vagalâmeurs nous touchaient du doigt pour savoir
si nous étions de vraies personnes en chair et en os. Quelques uns nous sollicitaient
d’une signature au revers de leurs tuniques et même des jeunes femmes sur leurs
petites culottes. D’autres nous jalousaient et un écervelé à provoqué Dorine au
sabre. Ce téméraire s’est aussitôt fait embarqué par des gardes de l’amirauté.
Cette notoriété n’avait pas que des avantages.
Arrivé à l’ambassade du port, Glassalo sauta de joie
lorsqu’il nous a vus entrer dans le salon où il était.
-
Dorine, Mike ! Criait-il en rigolant. Ho
comme vous êtes beaux ! C’est un habit de quoi ?
-
De capitaine en second. Que je lui répondais
avec un petit brin de fierté.
-
Capitaine en second ? Houuuuuu !
Capitaine en second ! Holalalala ! C’est un beau cadeau !
-
Oui très beau…. Et toi Glassalo comment
vas-tu ? Lui demanda Dorine.
-
Je vais bien, ils sont tous gentil avec moi
sauf lui, je ne l’aime pas. Répondit-il en nous montrant un vieux Creuztatomb
avec une jambe dans le plâtre.
Ce dernier haussa les épaules et quitta le salon en
clopinant.
-
Tu sais Glassalo, il ne faut pas nous en
vouloir de te placer à l’ambassade, c’est la règle, on ne pouvait pas te garder
et ici, ce n’est pas comme ailleurs, les non Vagalâmeurs où végétateurs ne
peuvent entrer en ville.
-
Ho je sais, ce n’est pas de votre faute…. Je
sais que je vais rester ici et qu’un jour un capitaine Kidnapingre me prendra
ou que Baccardi viendra me chercher. Moi j’aurais bien aimé être un Vagalâmeur
comme vous. Je vous jure que quand je rentrerais dans mon pays, je quitterais
la marine, je ne veux plus tuer ou faire prisonniers et vendre de Vagalâmeurs.
Non je ne veux plus.
-
Mais que vas-tu faire si tu n’es plus sur un
bateau ?
-
J’ai envie de faire des jolies choses avec le
bois. Des belles femmes comme vous Madame Dorine. Et c’est vous que je ferai en
premier comme ça quand je toucherais, ça me rappellera. Nous disait-il en
rougissant.
-
Tiens Glassalo, comme on sait que tu aimes
les bonbons, nous t’en avons acheté. Lui annonça Dorine en lui offrant un
paquet.
-
Ho
c’est gentil ! Ho c’est gentil ! Personne n’a jamais donné
autant de bombons à Glassalo…. Si, un peu le capitaine Baccardi mais jamais un
paquet entier. Oui c’est gentil…. Je ne pourrais plus tuer de Vagalâmeurs, je
le jure !
Nous sommes restés en sa compagnie une petite heure et
nous l’avons laissé en lui promettant de revenir dès que nos obligations nous
le permettraient.
Ce soir c’était encore une réception en notre honneur sur
le Hoturié.
Deux jours plus tard, Anizett et Amuramont s’embarquaient
sur le Mangepatou. Un bon navire bien armé avec à son commandement un capitaine
et des officiers d’expériences.
Une semaine après, Aline et Gary venaient nous dire aussi
au-revoir. Ils partaient sur le Tépacap un navire de la génération du
Bouchtrou.
Clakett, Dorine et moi nous trainions de bureau en bureau
d’études, de réceptions en réception et le plus souvent possible on rendait
visite à Glassalo avec un paquet de bombons.
La vie de célébrité commençait à nous peser. Notre
aventure sur l’île avait été publiée sur toutes les gazettes des ports
Vagalâmeurs. Nul doute que ça ferait très vite le tour de notre monde et cela
n’allait certainement pas redorer le prestige de Baccardi. Sa position connue,
tous ces ennemis allaient se précipiter vers l’île de l’ouest pour l’étriper.
Le balablen avait été mis à l’eau, c’était un magnifique
navire. Impressionnant de puissance et il nous tardait de larguer les amarres
et de partir. A bord, les ingénieurs du chantier naval nous expliquaient le
fonctionnement des machineries et de certains autres appareils dernier cris tel
que les canons à rotule qui avait l’avantage de ne pas avoir de sabord et donc
de rendre plus solide la coque. Nous avions déjà enrôlé quelques nouveaux
Vagalâmeurs pour les former et tous les jours des officiers d’autres navires
demandaient leur mutation pour le Balablen Ils étaient attiré par le navire
mais aussi d’être sous les ordres de héros.
Les premiers essais en mer nous remontaient le moral et
confirmaient que nous avions dans les mains un très bel et redoutable outil.
Avoir une possibilité d’inverser la rotation de la roue à aube pour faire
marche arrière allait nous donner un très gros avantage en combat naval.
Parfois, quand nous n’étions pas accaparés par un gala ou
une réception, Dorine et moi on s’amusait. J’adorais être à sa merci et quand
ficelé je subissais ses assauts j’en prenais un grand plaisir. Plaisir
réciproque d’ailleurs… Elle m’apprenait plein de petites choses et avec grand
délice je savais maintenant que les lèvres et la langue d’une femme servait
autant que celle des hommes.
De temps en temps, Clakett s’occupait également de nos
fesses et Dorine appréciait sa main.
48 jours que nous étions coincés à Galoban. Le balablen
était prêt et les nouveaux Vagalâmeurs se pressaient à la coupée pour y avoir
les dernières places.
Cela faisait trois jours que Clakett, Dorine et moi
avions quittés l’hôtel et pris nos quartiers à bord. Nos cabines étaient
confortables et je m’y trouvais beaucoup mieux que dans le grand et luxueux
appartement de l’amirauté.
Les jours passaient et maintenant, l’équipage était
presque complet. Il manquait Gary, Aline, Anizett et Amuramon. Dorine et moi
avions un peu de difficulté à assumer notre statut de capitaine en second et
Clakett nous rappelait avec de bonnes claques sur les fesses les
responsabilités et les devoirs de notre grade. Il est bien évident que cela se
faisait en privé.
Dans six jours nous appareillerons pour cette fois une
vraie campagne. Nous attendions avec impatience ce moment et nous guettions le
retour du Mangepatou et du Tépacap en espérant qu’ils n’avaient pas fait
mauvaise fortune.
Deux jours plus tard le Tépacap accostait. Nous nous
précipitions. Le capitaine nous fit monter à son bord, nous invita dans sa
cabine pour nous annoncer que l’enseigne de vaisseau Gary et le lieutenant Aline
avaient trouvés leur Inquêtrice et Inquêteur. Nous étions un peu déçus, mais
c’était une bonne nouvelle.
Le lendemain le Mangepatou accostait avec quelques dégâts
apparents. Son capitaine en second nous annonça également Qu’Anizett et
Amuramon avaient rejoint Fantasmagiaire.
Et bien voilà, des naufragés du Bouchtrou nous n’étions
plus que trois.
Episode 67
Larguer les amarres.
Les ultimes jours de préparatifs pour le grand départ et
enfin le jour J.
Tous les officiels étaient là. Tous croyaient dur comme
fer que le Balablen avec sa toute nouvelle technologie, serait la terreur de
nos ennemis. Clakett, Dorine et moi, de la passerelle nous écoutions d’une
oreille distraite les discours alambiqués qui se succédaient. Notre esprit
était déjà sur la mer.
Là-haut, au troisième étage de l’ambassade Glassalo nous
regardait d’un balcon, ce matin nous lui avions fait nos adieux en lui laissant
une colossale réserve de bombons. Mais ce cadeaux ne pouvait lui ôter l’immense
chagrin de notre séparation et même si d’ici on ne pouvait le discerner, nous
étions certain que ses pieds baignaient dans la marre de ses larmes.
Les invités et les officiels ont quitté le Balablen. Nous
avons largué les amarres et décroché du quai. Rien ne pouvait nous faire plus
plaisir. Quel dommage que Mirabelle, Aline, Gary, Anizett, Amuramon et même
Lady Dark ne soit pas à nos côtés pour apprécier ce moment et surtout ce
magnifique navire. Bah, ils avaient tous réussi leur quête et c’était cela le
plus important. Bien sûr Lady Dark en était l’exception mais qu’y faire, pour
le moment elle avait décidé de mettre sa quête en suspension et de vivre autre
chose.
Sur son balcon, Glassalo remuait le bras, c’était
probablement la dernière image qu’on aurait de lui.
Il n’y avait pas deux jours que nous étions en mer qu’un
navire Creuztatomb à voulu se frotter au Balablen. Nous avons pu nous rendre
compte à quel point ce nouveau mode de propulsion permettait des changements de
cap rapide et les Creuztatomb ont certainement apprécié la puissance de feu du
Balablen car si nous avons été légèrement touché par trois de leurs boulets on
ne leur à pas laissé le temps de tirer une seconde fois. Leur navire en deux
salves a explosé en mille morceaux. Les canons de notre bâtiment étaient trop
efficaces car s’il y avait des Inquêteurs à bord de ce navire ennemi ils
étaient perdus ainsi qu’un éventuel butin. Il nous fallait mieux gérer cette
puissance de feu pour suffisamment endommager sans totalement détruire.
Nous avons convoqué tous les officiers artilleurs pour
faire le point et mettre en place une stratégie un peu moins radicale. Les
prochains combats nous serviront de test.
Avec Dorine, au coucher du soleil nous sommes allés sur
le minuscule gaillard d’arrière au dessus du château. Cela nous rappelait de
bons souvenirs de quand nous étions fraîchement embarqué sur le Bouchtrou.
Pourtant il n’y avait que quelques mois mais ces instants nous paraissaient
déjà lointains.
En tant que capitaine en second, nous restions assez
proches des jeunes mousses Vagalâmeurs et nous ne refusions jamais de discuter
amicalement avec eux. C’était une attitude que nous avait transmise Mirabelle.
Les jours passaient et nous avons enfin adopté une
stratégie moins destructrice. Bien entendu les abordages faisaient morts et
blessés… Mais relativement limités car grâce aux batteries pivotantes des
ponts, nous réduisions de manière efficaces les équipages ennemis avant
abordage.
Des morts, des blessés, une longue histoire écrite par le
sang ! Notre planète plate était un équilibre étrange où les intérêts s’affrontaient
de manière violente. Selon la légende c’est d’une même personne que notre monde
était né. Un seul être qui avait, il y a très longtemps, séparé ses pulsions
bonnes et mauvaises parce qu’ensembles elles s’affrontaient, elles
s’opposaient, elles se contredisaient dans son esprit lui engendrant de
terribles maux de tête. Alors il eut l’idée des les diviser en plusieurs
territoires sur un monde qu’il avait construit. Il les avait séparés par un
grand océan en espérant que plus jamais elles ne s’entrechoqueraient. C’était
bien entendu une légende mais tant que l’origine de notre monde n’était pas
rationnellement établie, elle continuait d’être racontée comme une hypothèse
crédible.
Ce créateur supposé avait de vaine illusion et les
utopies, les fantasmes, l’amour, l’amitié, la cupidité, l’avidité, le pouvoir,
la cruauté et encore bien d’autres ont vite imaginé le moyen de parcourir
l’océan, commercer par affinité et s’opposer.
Toujours selon la légende, l’un des camps finira par
l’emporter sur les autres mais la question sera de savoir s’il pourra à lui
seul survivre ?
Les derniers combats avaient causé quelques dégâts au
Balablen. Nous avons mis le cap sur le port de Kédébrum en hissant le pavillon
rouge à croix verte. A bord deux Inquêtrices et un Inquêteur avaient trouvé
leur Vagalâmeur. Cette escale allait nous permettre de réparer convenablement
et peut-être pouvoir remplacer nos disparus.
Sur le quai, les Kidnapingres, les Creuztatombs, Les
entoqués et les Crévesueurs s’agglutinaient pour voir notre navire. On pouvait
lire dans leurs yeux l’étonnement mais aussi la crainte de nous affronter.
Cette frayeur ne durerait pas car nous savions tous que la technologie de
propulsion et d’armement du Balablen ne resterait pas longtemps secrète et que
dans quelques mois nos ennemis en construiraient d’identiques.
Le soir, à la taverne du port, nous avons appris que
Baccardi avait attiré sur l’île, par un feu de détresse, un navire Entoqués. Il
les avait piégés dans la jungle et avait fini par leur subtiliser leur navire
et s’enfuir de l’île avec ce qui lui restait d’équipage.
-
C’est du Baccardi tout craché. En concluait
Dorine devant une pinte de bière de poire.
-
Oui, du grand Baccardi ! que j’ajoutais
songeur en pensant à Lady Dark.
Trois jours plus tard nous avons appareillé. Le balablen
était comme neuf et le premier bateau Crèvesueur que nous avons croisé c’est
enfuit sans combattre. Nous n’avons même pas cherché à le poursuivre, c’était
un petit Navire qui ne devait pas avoir beaucoup de richesses à nous offrir.
Deux jours plus tard ce fut une rude bataille contre un
bateau Kidnapingre de fort tonnage et même si la victoire nous enjouait et que
le butin était conséquent, j’aurais préféré ne jamais croiser ce bâtiment. Un
des deux inquêteurs repêchés venait de me prendre Dorine.
C’est au port de Saldimanche que je lui faisais mes
adieux et croyez que cette fois j’en avais le cœur gros.
Me voilà donc maintenant seul avec Clakett. De la
passerelle extérieure je regardais l’océan. Ils me manquaient tous, Mirabelle,
Aline, Gary et bien sur Dorine. Je commençais sérieusement à déprimer tant que
je n’avais même plus envie de la moindre petite fessée.
-
Ta mélancolie me peine Mike. Me disait
Clakett en m’offrant un jus de fruit.
-
Elle passera dans quelques jours, le temps
que je digère et que je me fasse une raison. Lui répondis-je une larme dans les
yeux.
-
Pourtant tu savais qu’un jour cela
arriverait.
-
Oui… Je suis très content pour elle, mais
nous avions vécu tellement de choses ensemble que c’est vraiment dur. Oui très
dur…
-
Un jour toi aussi tu débarqueras à
Fantasmaginaire et vous vous retrouverez.
-
Un jour… Je commence à ne plus y croire.
Devenais-je pessimiste.
-
Il ne faut pas dire ça Mike, il faut toujours
garder l’espoir. Je suis depuis plus longtemps que toi en quête mais l’espoir
ne m’a jamais quitter et je peux même dire que ces dernier temps il brûle
intensément. Vous avez eut beaucoup de chance Dorine et toi quand tant d’autres
Vagalâmeurs ont perdu la vie dans cette quête.
-
Tu as raison. Mais…
-
Ton tour viendra Mike, j’en suis absolument
certaine !
-
J’aimerais avoir ton optimisme.
-
Viens donc manger un peu, ça va te changer
les idées. Me tira-t-elle pour me conduire au carré des officiers.
Trois mois que Dorine avait quitté le Balablen pour
fantasmaginaire. Nous allions de victoire en victoire. Certains abandonnaient
même leur navire avant de combattre, le Balablen était vraiment la terreur de
l’océan. Contrairement aux autres officiers et à l’équipage, cela ne me
réjouissait pas… Cela ne me réjouissait plus ! J’étais las de voir les
Inquêtrices et Inquêteurs donner leurs mains à d’autres. Mon souhait ne
brillait-il pas assez ?
Hier encore, trois Vagalâmeurs. Une galère impériale est
passée en chercher deux et nous nous
dirigeons vers le port de Fopadékoné pour débarquer le dernier couple.
Clakett faisait bien plus que m’épauler, elle était ce
que j’avais de plus chère dans ce monde.
A notre arrivé, quelle ne fut pas notre surprise à
Clakett et moi de découvrir un navire flambant neuf dont nous connaissions bien
le profil. C’était la copie conforme du Troudanlo sauf la couleur et quelques
modernités d’artillerie.
L’identité de son
capitaine ne pouvait faire de doute car sur sa coque était inscrit «
TROUDANLO 2 » Incroyable, ce diable de Baccardi s’était refait une
santé !
C’est un peu plus tard en fin d’après-midi que Clakett et
moi revenant de l’administration du port nous avons vu Baccardi sur le quai.
Visiblement il nous attendait, il était seul et sans arme.
-
Bonjour capitaine Clakett, bonjour capitaine
en second Mike ! Nous lança-t-il joyeusement.
Nous lui retournions sa politesse. Six gardes impériaux
s’approchèrent. Baccardi les regarda en leur faisant signe qu’il n’avait
nullement l’intention d’enfreindre la loi sur la zone neutre qu’étaient les
ports.
-
Nous avons appris comment vous vous êtes
sorti de l’île. Lui dit Clakett.
-
Pfff, Facile ! Les entoqués sont des
barbares sans cervelle ! Répondit-il en s’accompagnant d’un rire.
-
Et Lady
Dark ? lui demandais-je.
-
Aaaah cette chère Lady Dark ! Irremplaçable
Lady dark ! Un Inquêteur l’attendait sur un riche navire Creuztatomb tombé
entre mes mains. Elle est maintenant à Fantasmaginaire… Comme je la regrette.
Une aussi bonne cuisinière ne devrait pas être Vagalâmeur. Qu’y puis-je, sinon
de me faire une raison et n’avoir juste que le souvenir de ses bons petit
plats.
-
Et bien de notre côté c’est Mirabelle, Aline,
Gary, Anizett, Amuramon et Dorine qui sont à Fantasmaginaire. Que je lui annonçais.
-
Quel dommage, moi qui me faisais un plaisir
de vous inviter tous à dîner ce soir, mais ils le méritaient tous.
-
Êtes-vous sérieux Capitaine Baccardi ?
Lui demanda Clakett.
-
Absolument capitaine et puisqu’il ne reste
que vous deux mon invitation tient toujours.
-
Je suis désolé capitaine Baccardi mais ce
soir j’ai une réunion avec mes officiers supérieurs mais le capitaine en second
Mike, s’il le désire, pourra honorer votre invitation. Lui répondit Clakett.
-
Qu’est-ce que ce piège capitaine Baccardi ?
Le soupçonnais-je d’un coup fourré.
-
Capitaine en second Mike, je vous donne ma
parole qu’il n’y a aucune sorte d’entourloupe. Non, c’est fini, j’ai fais une
croix sur nos différents. Vous avez gagné et je suis bon perdant. De plus,
grâce à ce navire Creuztatomb très bien armé et qui avait les calles pleines,
je me suis redressé très rapidement. Belle aventure, voilà ce que j’en tire
aujourd’hui. Venez à mon bord dîner en
toute amitié capitaine en second Mike et je vous promets que vous ne le regretterez
pas.
-
D’accord, je vous fais confiance capitaine
Baccardi. A quelle heure ?
Il consulta sa montre à gousset et :
-
20 heures ça vous va ?
-
Parfait ! Que j’acceptais.
Episode 68
Le dîner de Baccardi.
A 20 heures précise je montais à bord du Troudanlo 2.
Baccardi m’attendait sur le pont et à ma grande surprise son équipage était
aligné au garde-à-vous. Dans le tas je reconnaissais Radukou, Fassoven,
Poirovin, Granpeti, Ematom et quelques autres. C’était amusant de les voir
ainsi me rendre les honneurs, moi un Vagalâmeur.
Je n’étais pas candide, c’était sur ordre de Baccardi et
non de leur propre initiative.
Baccardi me conduisit à ses quartiers. Dans sa salle à
manger privée il m’invita à m’asseoir et me servit du champagne à bulles
vertes.
C’est bien la première fois que nous étions face à face
en paix.
-
Vous voilà devenu capitaine en second. Une
promotion rapide. Rigola-t-il.
-
Vous y avez beaucoup contribué capitaine
Baccardi. Que je lui répondais ironiquement.
-
Laissons tomber les « vous » et les
« capitaine » nous sommes ce soir entre vieilles connaissances alors
appelle-moi Baccardi tout simplement.
-
D’accord, idem pour moi.
-
Donc j’ai participé à ta promotion… J’en tire
une certaine fierté d’ailleurs. Tu te rends compte, Dorine et Mike, les plus
jeunes capitaines en second de l’histoire, toutes marines confondues. Et moi,
Baccardi, j’étais de ce coup là !
-
Un coup qui vous a momentanément ruiné.
-
Il m’a fait connaitre Lady Dark c’est déjà
beaucoup. Mais aussi, je peux te l’avouer maintenant, votre évasion m’a évité
des remords.
-
Des remords ?
-
Si je vous avais vendu au Crevesueurs j’en
aurais eut. Me disait-il les yeux dans les yeux.
-
A ce point ?
-
Oui cher Mike, à ce point. La vengeance
m’aveuglait mais dans le fond je vous aimais bien jusqu’à avoir une certaine
admiration. Le meilleur élément de mon équipage ne vous vaut pas…. La preuve,
Certains ont même réussi à se faire berner et vous laisser le Klakoven. Paix
leurs âmes ! Je sais tout dans les détails parce que vos journaux ont
publié le rapport du capitaine Mirabelle. Je ne peux que m’incliner. Vous avez
eut du cran et de la lucidité.
-
Faut dire que Dorine et moi on avait la
haine.
-
C’est sûr que je vous en avais fait baver, ça
aide. Ha, ha, ha, ha !
-
Et tu avais en plus l’intention de
poursuivre !
-
Hummm, Je ne crois pas que je vous aurais
encore tourmenté longtemps…. Enfin je n’en sais rien… Mais buvons Mike, Buvons
à cette belle aventure.
-
Et Chapoklak ? Elle n’était pas sur le
pont à mon arrivée. Que je l’interrogeais en reposant mon verre.
-
Ha oui, Chapoklak…. Elle était devenue
jalouse de Lady Dark et je crois que si je n’y avais pas mis le holà elle me
l’aurait trucidé quelque part dans la jungle.
-
Et c’est quoi le « Holà »
-
C’est radical et définitif ! Me
répondit-il avec son petit rictus.
-
Personnellement, si je peux donner mon avis,
elle ne méritait que ça.
-
Peut-être… Fit-il pas tout à fait convaincu.
Dis-moi, c’est un sacré Navire le Balablen, tout le monde en parle et surtout,
personne ne veux le rencontrer. Paraît que les ingénieurs de votre chantier
naval ont trouvé une technique de propulsion révolutionnaire.
-
C’est exact !
-
Egalement de nouveaux canons bien plus puissants,
rapides et mobiles.
-
C’est encore exact mais je ne t’en dirais pas
plus.
-
Je ne te demande rien sachant que de toute
façon tu ne me dirais rien et ce n’est pas le but de mon invitation. J’ai vu
votre navire et je le trouve impressionnant mais personne n’est invincible et
le Balablen ne me fait pas peur.
-
Tu devrais pourtant.
-
Il me semble avoir connu deux mousses même
pas artilleur qui sont les seuls sur tout l’océan à avoir mis un boulet dans le
tube d’un extracteur et les mêmes avec rien dans les mains ont réussi à tromper
le tiers d’un équipage Kidnapingre armé.
-
C’est vrai Baccardi, c’est vrai… Tu as
raison, il n’y à rien d’impossible comme rien d’invincible.
Une bonne odeur de cuisine arrivait doucement dans la
pièce.
-
Si j’en crois ces vapeurs parfumées, tu as
engagé un nouveau maître coq qui ne doit pas être maladroit. Lui dis-je.
-
Oui il est bon mais dans notre monde je ne
trouverai jamais d’équivalent à Lady Dark. Répondit-il en plaçant lui même
assiettes et couvert sur la table.
-
Nous sommes trois ? Le questionnais-je
en comptant les assiettes.
-
Oui Mike, le maitre coq dîne avec nous. Il ne
devrait d’ailleurs pas tarder.
A peine avait-il dit cela que la porte s’ouvrait.
-
Glassalo toi ! que je m’exclamais de
surprise et de joie en reconnaissant sa bouille sous sa toque.
De son bras il me serra le cou à m’en faire perdre la
respiration.
-
Mike, Mike Mike ! Que je suis content de
te revoir hurlait-il joyeusement en me secouant dans tous les sens.
Baccardi le décrocha de mon pauvre cou et le fit
s’asseoir.
-
Tu aurais dû me dire Baccardi, j’aurais
apporté des bombons. Lui dis-je en me massant la nuque.
-
Il en a plus qu’il n’en faut jusqu’à s’en
gâter les dents. Me répondit-il en lui jetant un regard paternel.
Glassalo sautait de joie sur sa chaise.
-
Tu sais Mike, rigolait Baccardi, quand il a
su que tu viendrais dîner ce soir, il est devenu comme fou.il regrette
simplement que Dorine ne soit pas avec toi. De ta copine Il en a fait des
dessins partout dans sa chambre et même une petite sculpture en bois.
-
Sacré Glassalo ! Dis-moi, tu es content
d’être de nouveau avec le capitane Baccardi ? Lui demandais-je.
-
Ho oui et faut que je te dise, j’ai tenu ma
promesses, oui Mike j’avais juré et j’ai pas tué de Vagalâmeur. Demande au
capitaine Baccardi ! Hein capitaine, hein capitaine ?
-
C’est vrai, je peux en témoigner et c’est
bien le seul Kidnapingre ainsi. L’exception qui confirme la règle.
-
Tu l’as récupéré à l’ambassade de Galoban je
suppose ?
-
Oui, un Crèvesueur m’avait renseigné que le
Klakoven y était et qu’il y avait un de mes membres d’équipage un peu dingue
qui était arrivé avec vous. Ce ne pouvait être que Glassalo. Maintenant il est
maître coq sur le Troudanlo 2 et je dois dire qu’il se débrouille plutôt bien.
-
Oui, oui, C’est capitaine Baccardi qui est
venu me chercher. S’agitait joyeusement Glassalo.
Le capitaine tira sur un cordon pour qu’on n’apporte les
plats et qu’on nous serve. Il posa une main tendre sur la tête de Glassalo et
me dit :
-
Vous ne l’avez pas tué, il m’a expliqué et
pour ça je vous dis merci ! j’ignore ce que nous réserve l’avenir mais je
peux t’affirmer que tant que tu seras avec Clakett aux commandes du Balablen,
si jamais on se croise, je regarderais ailleurs et je changerais de cap. Un jour,
vous trouverez votre Inquêtrice et Inquêteur. Quand je l’apprendrais, je
m’occuperais du Balablen.
Le dîner fut très agréable accompagné de bonnes blagues,
de bons vins et le souvenir de la magistrale fessée que feu Patapin m’avait administrée.
Un passé qu’on évoquait sans haine…. Juste les anecdotes d’une périlleuse et
formidable aventure.
Ce fut tard dans la nuit que je suis remonté à bord du
Balablen.
Episode 69
L’inquêtrice.
Le lendemain en fin de matinée nous avons appareillé. Au
passage Baccardi et Glassalo nous ont salués.
La vie à bord me devenait monotone. J’en avais soupé des
combats navals, des coups de sabre, du sang et des Vagalâmeurs qui fermaient à
jamais leurs yeux. Clakett avait beau faire tout ce qu’elle pouvait mais mon
moral ne cessait de vertigineusement dégringoler. Si elle n’était pas avec moi,
je crois que je me serais déjà balancé à la flotte. Chaque inquêtrice ou
inquêteurs récupérés regardaient Clakett d’une étrange façon et chaque fois je
craignais qu’ils me prennent mon unique bien. Elle était mon réconfort, ma
douceur, mes petites violences quand mes fesses le réclamaient. Elle était mon indivisible
bouée dans cette mer de sauvagerie et je passais de plus en plus de temps dans
ses bras. Je passais de plus en plus de temps à me perdre dans l’envoutement de
ses yeux unique endroit où je me sentais bien. Nous avions une complicité qui
me faisait parfois oublier ma quête. Hier soir, elle m’avait sauté dessus et
attaché à mon lit après m’avoir flanqué une copieuse fessée. Sans défense, je
fus son esclave sexuel. A son tour, armée d’un martinet, elle me soumettait au
jeu d’un amour particulier. Je succombais quand elle s’empalait sur moi, je
savourais son sexe, je dégustais le feu des lanières quand ma fougue
faiblissait.
Elle m’apprenait de nouveau jeu, elle me testait et je
succombais de cet amour si particulier. J’étais à elle, rien qu’à elle, elle
était à moi, rien qu’à moi et je n’avais qu’une hantise, c’est qu’un jour
prochain un Inquêteur me l’enlève. Je n’y survivrais pas !
Un matin, regardant l’horizon, je lui avouais pour la
première fois de vive voix mon amour pour elle. Bien sur, cette union était
impossible parce qu’elle était sans avenir dans ce monde où inquêtrice et
inquêteur un jour nous sépareraient. Un amour intense mais éphémère car la vie
pouvait d’un moment s’arrêter d’un coup de sabre, d’une balle, d’un boulet ou
d’être esclave des Crèvesueurs.
Et l’un de nous deux, avec de la chance, sentira un jour
sa main prise par une inquêtrice ou un inquêteur. Etrangement, pour moi je n’y
voyais qu’un seul avantage, celle d’enfin vivre dans un monde en paix et
retrouver mes amis. Au fond de moi, j’étais persuadé qu’aucune Inquêtrice ne
pourrait remplacer Clakett.
Elle avait sourit de ma déclaration et je ne sais
pourquoi, je sentais en elle un soulagement comme si elle attendait cette
révélation depuis longtemps. Elle me déposa un petit bisou sur la joue avant de
rejoindre la passerelle et ordonner qu’on mette le cap sur le territoire
Végétateur.
Deux semaines plus tard, nous sommes arrivés au port de
Galoban et nous avons amarré le Balablen juste derrière une galère impériale
qui attendait certainement le retour d’un navire. Pas le notre, nous n’avions
pas d’inquêteur et d’élu à bord.
Appuyé sur le bastingage je regardais ce magnifique
navire laqué et enluminé de dorures. Mes yeux s’enivraient en suivant les
méandres compliqués de ses décorations. Je contemplais ce navire qui allait
encore emporter des heureux vers Fantasmaginaire. Et moi…. Moi dans deux jours
je serais sur l’océan à traquer l’ennemi et fêter mes 19 ans entre deux
abordages. Une année déjà et j’imaginais les bougies s’accumuler et vieillir,
vieillir et vieillir avec mes gallons. Je pensais à Dorine, Aline, Mirabelle,
Lady Dark et Gary. Que faisaient-ils en ce moment dans ce paradis sans guerre
et sans prédateurs. Je ne doutais pas de leur bonheur pas plus que de mon
malheur.
Clakett m’a rejoint.
-
Alors Mike, tu rêves ?
M’interrogea-t-elle.
-
Oui… Que je soupirais.
-
Elles sont vraiment magnifiques ces galères.
-
Oui… Que je soupirais encore.
-
Elle va bientôt partir pour Fantasmaginaire.
-
Oui… En soupirant toujours.
-
Elle n’attend que son Inquétrice et son
Vagalâmeur qui iront s’enlacer dans la douceur de ses appartements.
-
Oui…
-
Viens Mike, il est temps de partir, nous
n’avons plus rien à faire ici. me déclara Clakett.
Je tournais mon visage vers elle avec un peu d’étonnement
et bien plus encore quand de son ongle elle gratta le maquillage qui avait
toute cette aventure camouflé sur sa joue droite la petite pastille nacrée.
Elle me tendit la main, j’y déposais la mienne.
-
Fantasmaginaire nous attend Mike !
FIN
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